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jeudi 24 septembre 2020

La gestion du risque juridique dans la société anonyme

 Diriger une société est devenu un métier à hauts risques, très exposé et plutôt périlleux.

En effet aux risques traditionnels d’ordre économiques et financiers auxquels les dirigeants sociaux doivent faire face s’ajoute, dans un contexte de plus en plus réglementé, toute une série de zones rouges d’ordre juridique dont le franchissement occasionne inéluctablement la mise en œuvre de leur responsabilité.

La prolifération de nombreuses règles de droit dans les différentes matières entourant l’entreprise multiplie le risque de transgression et la responsabilité des dirigeants peut aussi bien être encourue pour un simple retard de livraison, que pour une faute de gestion, une fraude fiscale, ou encore le non-respect des règles d’hygiène et de sécurité.

Les dirigeants des sociétés anonymes, face aux nombreuses obligations résultant de la multiplication des textes normatifs et à défaut de cerner l’ensemble des risques encourus  se retrouvent souvent d’une manière ou d’une autre fleurtant avec l’illégalité.

En vue d’assurer une prévention efficace des risques, il s’agit dans un premier temps de les identifier pour mieux les gérer, seule condition d’un management respectueux des différentes prescriptions légales sans être figé par la peur de les transgresser.

Par conséquent, il serait pertinent de passer en revue les différents risques de nature à enclencher la responsabilité des dirigeants qu’ils soient issus du droit des sociétés (I) ou de la législation fiscale (II).

 

I.                   Les risques nés du droit des sociétés :

Dans l’exercice quotidien de leur mission  de gestion de la société, les dirigeants peuvent être amenés à commettre des erreurs pouvant entrainer des conséquences plus ou moins graves.

Ainsi, les dirigeants de la société anonyme soient, ses administrateurs, les membres du directoire ou du conseil de surveillance doivent faire face à des risques résultant de la mise en œuvre de leur responsabilité civile (1), pouvant être aggravée en cas de procédure de redressement ou de liquidation judiciaire (2), mais aussi à un véritable  risque pénal (3).

 

1)   Les risques résultant de la mise en œuvre de la responsabilité civile des dirigeants

En vertu de l’article 352 de la loi sur la société anonyme, les administrateurs, membres du directoire ou du conseil de surveillance peuvent se voir reprocher individuellement ou solidairement  par les actionnaires de la société ou les tiers, trois types d’agissements :

·        La violation des dispositions législatives ou réglementaires

Ainsi, tout manquement à une prescription légale ou réglementaire applicable aux sociétés anonymes constitue une occasion de la mise en œuvre de la responsabilité civile du dirigeant et par conséquent constitue un risque pour lui.

Il peut s’agir notamment du non-respect des dispositions concernant la tenue des assemblées générales (défaut de convocation de l’assemblée annuelle, non-respect des règles de majorité et de quorum, défaut de formalité de publicité,....) ou relatives au fonctionnement du conseil d’administration (non-respect des dispositions applicables aux conventions réglementées, établissement d’un acte excédant les pouvoirs du conseil d’administration....).

·        La violation des statuts :

L’inobservation des prescriptions statutaires expose également les dirigeants au risque de la mise en œuvre de leur responsabilité.

Ainsi, ne pas tenir compte des stipulations limitant les pouvoirs du conseil d’administration ou prévoyant une affectation déterminée des bénéfices sociaux est susceptible d’engager la responsabilité civile des dirigeants.

·        La faute de gestion

La loi sur la société anonyme se contente de mentionner cette faute sans aucune précision supplémentaire ce qui laisse supposer que la faute de gestion n’est pas subordonnée à l’existence d’une faute volontaire des dirigeants.

En vue de mieux identifier ce qui pourrait être considéré comme une faute de gestion, la jurisprudence française est à cet égard parlante et trois catégories d’agissements se dégagent.

Il s’agit des :

*Agissements volontairement contraires aux intérêts de la société, par exemple le fait de participer au financement abusif d’une société par une autre (Chambre de cassation) ;

*Faute d’imprudence telles que le prêt de fonds sociaux dans des conditions telles que le remboursement paraît improbable (Chambre de cassation) ;

*Faute de négligence, comme l’absentéisme, le défaut de surveillance des dirigeants sociaux.

 

Il est à signaler que conformément au droit commun, la responsabilité ne peut être engagée que s’il est établi que la faute commise entraine un préjudice et qu’il existe une relation de cause à effet entre cette faute et le préjudice.

Le dirigeant ayant commis l’une de ces fautes risque de voir engagées à son encontre deux types d’actions ayant pour objet la réparation du préjudice subi :

*Une action individuelle des actionnaires qui l’exercent en leur nom personnel en vue de réparer le préjudice causé à chacun d’eux ;

*Une action sociale des actionnaires pouvant être intentée individuellement ou en se groupant afin de solliciter la réparation du préjudice subi par la société.

 

Enfin, la seule manière de se prémunir contre ces risques est, sans aucun doute, de s’abstenir de commettre ces fautes car les clauses limitant l’exercice de l’action en responsabilité sont prohibées en vertu de la loi sur les sociétés anonymes qui prévoit que : « Est réputée non écrite toute clause des statuts ayant pour effet de subordonner l’exercice de l’action sociale à l’avis préalable ou à l’autorisation de l’assemblée générale, ou qui comporterait par avance renonciation à cette action ».

2)   La responsabilité civile aggravée en cas de redressement ou de liquidation judiciaire

Le code de commerce aggrave la responsabilité du dirigeant en cas de procédure de redressement ou de liquidation judiciaire et les risques encourus dans ce cas sont considérables puisque le dirigeant peut être condamné au comblement du passif, à l’extension de la procédure à ses propres biens, à la déchéance commerciale et à des peines de nature pénale très graves comme l’emprisonnement.

·        Le comblement du passif peut être ordonné aux dirigeants dont la gestion a contribué à créer une insuffisance d’actif et envers qui une action est engagée dans ce sens.

Pour cela, la commission d’une faute de gestion par le dirigeant doit être prouvée par la violation des règles légales ou statutaires, imprudence, mauvaise comptabilité, poursuite d’une activité déficitaire, ainsi que l’existence du préjudice qui est l’insuffisance d’actifs et le lien de causalité entre la faute et ce préjudice.

 

·        L’extension du redressement ou de liquidation judiciaire au dirigeant

Le code de commerce prévoit un ensemble de faits pouvant entraîner l’ouverture d’une procédure de redressement ou de liquidation judiciaire à l’égard d’un dirigeant, notamment :

*L’utilisation des biens de la société comme les siens ;

*La poursuite abusive, dans un intérêt personnel, d’une exploitation déficitaire et qui ne pouvait conduire qu’à la cessation des paiements de la société ;

*La tenue d’une comptabilité manifestement incomplète ou irrégulière.

 

·        La déchéance commerciale

De même, le code de commerce stipule que le dirigeant risque d’être affecté de déchéance commerciale et se voir interdire de diriger, gérer, administrer ou contrôler, directement ou indirectement, toute entreprise commerciale ou artisanale, et toute société commerciale ayant une activité économique.

Cette déchéance peut être prononcée à l’encontre du dirigeant qui a par exemple :

*Exercer une activité commerciale, artisanale ou une fonction de direction ou d’administration d’une société commerciale contrairement à une interdiction prévue par la loi ;

*Omis de faire, dans le délai de quinze jours, la déclaration de l’état de cessation de paiements ;

*Procéder de mauvaise foi, au paiement d’un créancier au détriment des autres créanciers pendant la période suspecte.

 

·        Les sanctions pénales

Le code de commerce stipule qu’en cas d’ouverture d’une procédure de redressement ou de liquidation judiciaire, le dirigeant peut même être sanctionné  pénalement pour «  Banqueroute » et ce en cas de commission des faits suivants :

*Avoir effectué des achats en vue d’une revente au-dessous du cours ou employé des moyens ruineux pour se procurer des fonds dans l’intention d’éviter ou de retarder l’ouverture de la procédure de traitement ;

*Avoir détourné ou dissimulé tout ou partie de l’actif du débiteur ;

*Avoir frauduleusement augmenté le passif du débiteur ;

*Avoir tenu une comptabilité fictive ou fait disparaitre des documents comptables de l’entreprise ou de la société ou s’être abstenu de tenir toute comptabilité lorsque la loi en fait l’obligation.

 

Les dirigeants déclarés coupables de banqueroute sont passibles d’une sanction pénale d’une extrême gravité puisqu’il s’agit d’une peine d’emprisonnement et d’une amande ou de l’une de ces deux peines seulement.

D’ailleurs cette peine est portée au double lorsque le banqueroutier est dirigeant, de droit ou de fait, d’une société dont les actions sont cotées à la bourse des valeurs.

 

3)   Le risque pénal

La loi relative à la société anonyme se caractérise par une inflation de sanctions pénales réprimant les agissements des dirigeants sociaux.

Ainsi, et du fait de la nature même de ces sanctions, le risque pénal est incontestablement le plus périlleux et nécessite une vigilance particulière en vue de le prévenir et de l’éviter.

A côté des délits de droits commun pouvant être commis par les dirigeants comme l’escroquerie, l’abus de confiance, etc..., quatre délits majeurs engageant la responsabilité pénale particulière des dirigeants au titre de la direction et de l’administration de la société sont prévus par la loi sur la société anonyme et sont passibles d’un emprisonnement et d’une amende ou de l’une de ces deux peines seulement.

Il s’agit de :

·        La distribution de dividendes fictifs de la part des dirigeants qui, en l’absence d’inventaire ou au moyen d’inventaires frauduleux, auront, sciemment, opéré entre les actionnaires la réparation de dividendes fictifs ;

·        La présentation ou publication de comptes sociaux infidèles

Se sont rendus coupables de cette infraction, les dirigeants sociaux qui auront sciemment publié ou présenté aux actionnaires, en vue de dissimuler la véritable situation de la société, des états de synthèse annuels ne donnant pas, pour chaque exercice, une image fidèle du résultat des opérations de l’exercice, de la situation financière et du patrimoine, à l’expiration de cette période.

·        L’abus de biens sociaux ou du crédit de la société.

Il concerne les dirigeants de mauvaise foi, qui ont usé des biens ou du crédit de la société, d’une manière qu’ils savaient contradictoires avec les intérêts économiques de celle-ci et ce, à des fins personnels ou en vue de favoriser une autre société ou entreprise dans laquelle ils étaient intéressés directement ou indirectement.

·        L’abus des pouvoirs ou de voix

De même la loi sur la société anonyme réprime les dirigeants qui, de mauvaise foi, auront fait des pouvoirs qu’ils possédaient ou des voix dont ils disposaient, en cette qualité, un usage qu’ils savaient contraire aux intérêts économiques de la société, à des fins personnelles ou pour favoriser une autre société ou entreprise dans laquelle ils étaient intéressés directement ou indirectement.

 

II.               Les risques nés de la législation fiscale et sociale

A côté des risques prévus par la législation applicable aux sociétés anonymes, le dirigeant doit tenir compte notamment des risques encourus en matière fiscale (1) et sociale (2).

 

1)   Le risque fiscal

Les dirigeants s’exposent, dans leur relation avec l’Etat, à des risques d’ordre fiscal assez lourds puisque l’arsenal législatif en vigueur consacré par le livre des procédures fiscales prévoit la mise en cause des dirigeants en matière fiscale.

·        Fraude fiscale

Les lois relatives à l’impôt sur les sociétés, à l’impôt sur les revenus, et à la taxe sur la valeur ajoutée, prévoient qu’est coupable de fraude fiscale toute personne qui, en vue de se soustraire à sa qualité de contribuable ou au paiement de l’impôt ou en vue d’obtenir des déductions ou remboursement indus, utilise l’un des moyens suivants :

*Délivrance ou production ce factures fictives ;

*Production d’écritures comptables fausses ou fictives

*Vente sans factures de manière répétitive ;

*Soustraction ou destruction de pièces comptables légalement exigibles ;

*Dissimulation de tout ou partie de l’actif de la société ou augmentation frauduleuse de son passif en vue d’organiser son insolvabilité.

Cette infraction, bien qu’ayant un caractère fiscal, est réprimé pénalement d’une amende et d’une peine d’emprisonnement

 

·        Procédure de mise en œuvre

Une fois les agissements précités établis, l’administration doit prouver le lien de causalité entre ceux-ci et l’impossibilité de recouvrer l’impôt. A cette occasion, le juge vérifiera que les services fiscaux ne sont pas pour partie responsable de l’impossibilité de recouvrer l’impôt en n’ayant pas fait les contrôles dans les temps et ensuite en n’ayant pas fait tous les actes de poursuites qui s’imposaient.

En effet, la responsabilité des dirigeants n’est pas de droit, c’est une juridiction qui doit l’ordonner dans le cadre d’une procédure bien spécifique.

Cette procédure pour l’application des sanctions aux infractions fiscales a été instituée par le livre des procédures fiscales, et prévoit la chronologie suivante :

·        Constatation de l’infraction

L’infraction fiscale en question est constatée par procès-verbal établi par deux agents de l’administration fiscale, ayant au moins le grade d’inspecteur, spécialement commissionnés à cet effet et assermentés conformément à la législation en vigueur.

Il est important de noter que l’infraction ne peut être constatée que lors d’un contrôle fiscal.

 

·        Identification du responsable de l’infraction

Quel que soit le statut juridique du contribuable, soit une personne physique ou morale, la peine d’emprisonnement prévue ne peut être prononcée qu’à l’encontre :

*De la personne physique qui a commis l’infraction ou à l’encontre de tout responsable, s’il est prouvé que l’infraction a été commise sur ses instructions et avec son accord ;

*Et de toute personne convaincue d’avoir participé à l’accomplissement des faits précités, assisté ou conseillé les parties dans leur exécution en l’expert-comptable appelé à accompagner la société dans l’accomplissement de ces déclarations périodiques.

 

·        Présentation de la plainte à l’avis d’une « commission des infractions fiscales »

La plainte tendant à l’application de sanctions prévues doit au préalable, être présentée par le ministre des finances ou la personne déléguée par lui, à titre consultatif, l’avis d’une commission des infractions.

Cette commission est présidée par un magistrat et comprend deux représentants de l’administration fiscale et deux représentants des contribuables choisis sur des listes présentées par les organisations professionnelles les plus représentatives.

·        Saisie du procureur et du Juge d’instruction

Après consultation de la commission des infractions fiscales, le ministre des finances ou la personne déléguée par lui à cet effet, peut saisir de la plainte tendant à l’application des sanctions pénales prévues par le procureur compétent à raison du lieu de l’infraction.

A son tour, le procureur doit saisir de la plainte le juge d’instruction.

 

·        Solidarité fiscale

Le livre des procédures fiscales a prévu un mécanisme basé sur la notion de solidarité entre les dirigeants de la société et la personne morale lorsque cette dernière ne peut plus faire face aux impositions dont elle a la charge.

Le dirigeant sera alors assigné devant le tribunal par le comptable public aux fins de condamnation et il sera redevable sur ses biens propres des impôts de la société non recouvrés

 

2)   Le risque social

Dans le cadre de la gestion quotidienne de l’entreprise, le code du travail met à la charge des dirigeants un ensemble d’obligations légales de nature à éviter tout risque social.

En effet, le code du travail responsabilise entièrement les dirigeants puisque la plupart des prescriptions légales s’adressent à l’employeur et non à l’entreprise et sont assorties de sanctions de nature pénale en cas de non-respect.

A cet égard l’importance de la prise en compte du risque social dans la gestion de l’entreprise puisque la responsabilité de l’employeur constitue une véritable contrepartie à son triple pouvoir à la fois de direction, réglementaire et disciplinaire.

Ainsi, par exemple, en matière d’hygiène et de sécurité, le code du travail prévoit que « l’employeur doit veiller à ce que les locaux de travail soient tenus dans un bon état de propreté et présenter les conditions d’hygiène et de salubrité nécessaires à la santé des salariés », mettant ainsi à la charge du dirigeant de multiples obligations sanctionnées par une amende.

De même une amende est prévue en cas de violation des dispositions du code de travail relatives à la procédure de licenciement pour motifs technologiques, structurels ou économiques et à la fermeture d’entreprises.


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